Il y a des fois où on a l'impression que tout ne se déroule pas comme d'habitude. Je me rappelle un de nos profs particulièrement ennuyeux qui avait un don particulier. Il avait ce talent qui lui permettait, tel un sorcier vaudou, de pouvoir ralentir le temps. Quand on entrait dans sa salle, les pendules semblaient se figer à tout jamais sur 8H00. J'ignore s'il avait acquis ces connaissances en sorcellerie lors d'un passage chez nos voisins animistes, mais j'ai fortement pensé à cela quand je suis arrivé chez "plan express".
La semaine dernière, on m'a confié une mission de la plus haute importance. Aller chez "Plan express" pour y tirer 5 exemplaires de chacun de nos plans pour
le projet.
Cette missive, provenant d'une haute instance hiérarchique, m'est revenue tout naturellement quand pour une raison inconnue, chacun de mes petits camarades
s'est trouvé maladif au moment de désigner l'heureux élu pour une virée chez notre imprimeur favori.
C'est le début de l'après midi, le temps est assez lourd.
Je prends mon courage à deux mains, et me mets en route dans la joie et la bonne humeur. Je prends place au volant de ma charrette bleue réputée dans le tout Abidjan, et rebaptisée (à juste titre d'ailleurs) le "worô-worô" par mes collègues.
Je vérifie les rétroviseurs, boucle la ceinture et full contact.
Mais bientôt, les embouteillages (fort nombreux vers 14H), les mauvais conducteurs, les différentes senteurs d'oxydes de souffre et autre protoxydes d'azotes, toutes plus parfumées les unes que les autres, la chaleur et l'humidité régnants, commencent leur grand travail de sape pour mon moral. J'arrive chez l'imprimeur, trempé, et de mauvaise humeur.
Une fois à l'intérieur, après avoir demandé à deux ou trois personnes le chemin à suivre, je découvre tout le matériel classique d'une imprimerie. Je me dis
"chouette ça ne devrait pas durer longtemps...." ~qu'est-ce que j'ai été naïf encore une fois~
J'ouvre la porte et je bascule dans l'autre monde. Le préposé aux plans (appelons-le M. le boss) semble s'extirper de ses rêveries les plus insolites.
J'entame alors la conversation : bonjour, je voudrais imprimer des plans... bla... bla et bla.
"Il n'y a pas de problèmes" me répond mon interlocuteur. (super)
Un quart d'heure après il n'y a toujours aucun tirage de sorti, et ce, pour des raisons multiples (vérification des appareils, de l'horloge et que sais-je encore...)
Bon, comment on les plie, ces plans ? Et celui-là vous ne voulez pas changer le format ? Lui il est trop grand je ne peux pas le plier (ou la la , ça commence mal)
Après moult réglages et préparatifs, les plans sortent au rythme lent mais continu de la grosse machine. Or, entre temps, de nouveaux clients sont apparus et
viennent perturber la scène qui se déroulait pourtant paisiblement.
Il y en a un qui veut une copie de son plan en calque, l'autre qui veut des formats un peu spéciaux, ou des matériaux insolites.
L'employé me lance "comme il n'a qu'un seul plan à tirer je vais le faire passer avant vous !", et il refait les réglages pour le veinard.
Là, ça commence à chauffer intérieurement, j'étais là le premier et je me retrouve avec la moitié des dessins d'achevés d'un côté et des électrons libres venus déranger M. le boss dans son activité méthodique de l'autre. D'ailleurs, M. le boss sans perdre de son flegme qui le caractérise tant, tente autant que faire se peut de répondre à toutes ces demandes simultanées. Mais je sens qu'il sera bientôt débordé si un élément perturbateur venait à s'inviter dans l'action.
Et bientôt chacun réclame un service à l'employé. La salle ne désemplit pas et s'en trouve bientôt franchement animée et je me demande comment je vais me sortir de ce pétrin dans lequel je me suis fourré. Je ne peux plus rebrousser le chemin, il faut à tout prix que je récupère l'objet de mon déplacement. Cela fait sûrement plus d'une heure que je suis entré en ces lieux et je regrette sincèrement de ne pas avoir pris un moyen de distraction quelconque. Je voyais encore de nouveaux clients arriver avec de multiples requêtes pour submerger encore un peu plus celui qui devait m'imprimer mes plans. Et la salle ne désemplissait pas, avec ce bruit de fond qui casse les oreilles de chacun.
Et c'est à ce moment que le téléphone à jugé bon de se mettre à sonner, comme si tout ce bordel ne suffisait pas. M. leboss s'est figé dans une expression fort singulière. Là j'ai pensé à un truc informatique "buffer overflow" je ne suis pas sûr de ce que cela signifie, mais je trouve que ça correspondait bien au moment. Un peu comme si M.leboss était un processeur qui venait d'atteindre son traitement maximum d'information. M.Leboss (après une mûre réflexion) se
tourne alors vers l'objet qui sonne (driiiiiiiing driiiiiing) sans déplacer de poussière et une fois arrivé devant attend que la sonnerie retentisse à nouveau avant de décrocher et d'entamer la conversation avec bonhomie. A ce moment-là je n'en peux plus, je me demande ce que je fous là au milieu de ce bordel sans nom. La scène vire alors au burlesque, ou au grotesque, je ne sais plus, d'ailleurs je crois qu'à cet instant, une partie de mon âme a abandonné mon être et a tenté de s'échapper de ce lieu maléfique qui sentait sûrement un peu trop la sueur.
Quand soudain apparaît un nouveau larron, le sourire jusqu'aux oreilles, et l'air pas franchement décontracté. Il a réussi à se faufiler jusqu'au comptoir et M. le boss s'approche de lui pour poser la question fatidique "que voulez-vous ?" Et l'autre de répondre avec sa mine enjouée en pointant la porte des cabinets avec son index droit "oui, je peux aller uriner ?"
J'avais oublié à quoi servait ce lieu... (ce comportement est finalement assez rare puisqu'on peut voir tout le monde pisser dans la rue plutôt tranquillement) Mais où suis-je ?
A la suite de cette après-midi mémorable, je suis rentré chez moi le coeur léger, je me suis dit que plus rien ne pouvait m'arriver, et qu'après avoir autant rongé mes ongles, je pouvais patienter dans les files d'attentes des plus grandes attractions ou des musées les plus réputés au monde sans m'ennuyer outre mesure.
Merci Plan express.
Nota: Pour des raisons de sécurité, certains protagonistes de l'histoire ont été floutés ou rendus anonymes. La société Plans Express S.A.R.L n'existe point, toute ressemblance avec une entreprise, physique ou morale, existant, ou ayant existé, serait purement fortuite, indépendante de ma volonté, et franchement abracadabrantesque.
Pour terminer -> une note du rédacteur. Il n'est pas du tout interdit de laisser un commentaire, une impression, ou même une remarque ou une insulte. J'ai cru comprendre que souvent les commentaires ne marchent pas, eh bien envoyez un petit mail, vous avez mon adresse de toute façon. La fréquentation n'a pas baissé alors pourquoi les commentaires le devraient ?
Et si vous avez des idées à me suggérer c'est bienvenu également. Je commence à avoir du mal à trouver de l'inspiration pour ce blog...
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